vendredi 21 septembre 2012

étape 48 : ASTORGA - PONFERRADA - 61 km

samedi 9 juin 2012


  Je ne suis pas très matinal aujourd'hui et pour rester sur le chemin, il me suffit au début de suivre les sacs à dos qui me précèdent. Un voile gris maintient le soleil hors de vue et crédite l'air d'un petit 10° C. La veste polaire est plus que jamais de rigueur.

  On quitte l'ambiance de la Castille et de ses plateaux pour s'élever dans un décor de montagne rappelant le début du pays basque français. Les dômes environnants se dissimulent dans les nuages et c'est dans cet environnement que j'atteins Foncebadon au bout de six heures.

  Quelques maisons déshéritées échouées sur un mamelon rocheux, un paysage de lande, Foncebadon est l'archétype de ces hameaux espagnols voués à l'abandon qui connaissent une timide renaissance de par le passage et les haltes des pèlerins. Je m'y arrête pour déjeuner, encore humide de la dernière ondée et j'ai l'impression d'être transporté dans un village des Alpes, à l'approche de l'automne. Vraiment, je me faisais une autre image de l'Espagne au mois de juin.

  Restauré, j'entreprends la montée vers la Cruz de Ferro (croix de fer), point culminant du chemin affichant ses 1 500 m d'altitude. Rien à voir avec le col de Roncevaux, la montée est plus progressive, alternant effort et réconfort (on grimpe puis on descend), sous une météo à l'exact opposé de ce que j'ai vécu dans les Pyrénées.

  Au détour du sentier longeant une petite route étonnamment circulée, j'aperçois la Croix de Fer que j'atteins cinq minutes plus tard. Et là...déception. Pas déçu par la croix hissée sur son monticule de pierres plus ou moins déposées par les pèlerins et symbolisant l'abandon des biens matériels accumulés en ce bas monde, mais déception de la perversion quasi touristique du lieu. Pas encore de baraque à frites mais un très grand parking et des circuits de mini-bus apportant leur lot de gens de la ville, venus endimanchés à l'assaut du tas de pierres pour se faire photographier au pied de la croix. Voila l'explication de la circulation anormale. Et ça papote à qui mieux mieux, on se croirait au Mont Saint-Michel. Dans cette situation, le pèlerin, minoritaire, est le personnage incongru de la scène. Du coup, le dépôt de sa pierre perd de sa belle symbolique. Dommage. 

  Après la Cruz de Ferro, toujours noyé dans l'air humide, le chemin redescend vers Manjarin et son refuge des templiers, des plus spartiates. On peut s'y arrêter quelques instants pour se réchauffer en buvant un café ou une infusion dans une cabane ornée de posters et de souvenirs artisanaux, tout en se replongeant dans des réminiscences de l'esprit hippie. A l'évidence, les conditions de vie sont rudes et l'entraide impérieux. Est-ce pour cela que l'harmonie semble régner et que les gens paraissent heureux ? J'aime à le croire.

  Puis c'est la descente vers Ponferrada et son château des templiers, à travers un relief tourmenté, des landes succédant aux roches, aux confins de la Castille. Ça sent la Galice toute proche ; d'ailleurs... il pleut.

  Au refuge du soir, je suis voisin de chambrée de Serge, chemineau par goût et choix de vie, parcourant tous les chemins d'Europe avec fort peu, ne courant après rien, aucune quête quelconque, juste en harmonie avec sa conception de l'existence. Habité par la foi, il trouve réconfort et assistance dans la prière qui lui sert souvent de viatique. Son budget est inférieur à 10 € par jour ce qui ne l'empêche pas d'acheter de grands sacs poubelles et de collecter avec une longue pince les détritus abandonnés par les pèlerins indélicats le long du chemin. Les dates des fêtes religieuses sont ses marqueurs temporels et la bonté de son regard semble infini. Un sacré personnage.



nb : vidéos tournées en 1080p ; si chargement trop lent en plein écran, passer en 720p ou 480p






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